Coronavirus : Pour un changement radical de paradigme de Gouvernance

La pandémie causée par le coronavirus à travers la maladie du Covid - 19, qui n'est pas seulement une crise sanitaire sans précédent mais un "fait social total" au sens de Marcel Mauss en cela qu'elle s'invite dans tous les aspects de la vie sociale interdisant même l'interaction interpersonnelle, a mis en ėvidence l’impréparation de l'ensemble des États du monde à faire face à ce genre de catastrophes naturelles extrêmes.

 

En effet, les gouvernements notamment ceux des pays dėmocratiques du Nord, ô suprême surprise, qui exercent pourtant le leadership politique et économique au niveau mondial, ont été pris de court par la vitesse de propagation du virus.

 

Cette réaction tardive et inadaptée de nos gouvernants s’explique aussi par la nature éminemment bureaucratique et procédurale voire procédurière de la logique de fonctionnement de ces États qui ne laisse aucune place à des moyens d’action plus naturels et plus spontanés donc plus en adéquation avec la nature de la crise actuelle comme le simple bon sens ou l’intuition par exemple. Laquelle intuition provient pourtant des tréfonds de notre être puisqu' elle découle de l’instinct de survie que nous avons en nous et qui a vocation à nous sauver des assauts de la nature depuis la nuit des temps.

 

Quand la nature reprend ses droits avec une telle véhémence, il devient irrationnel voire aberrant d’attendre que des élections se passent pour prendre des mesures plus drastiques contre la pandėmie ou encore de tergiverser en prenant pour alibi la réaction de la bourse ou le profit des entreprises….comme cela est arrivé dans certains pays dėveloppės.

 

Inopėrants le sont aussi ces plans d’urgence ou contingency plans, rigides à souhait, et qui fixent des niveaux d’alerte allant de un à quatre par exemple alors que des milliers de personnes meurent sous nos yeux au motif qu’on attend le passage au stade suivant pour monter en puissance dans l’action.

 

Or, c'est de la préservation de la vie humaine sur terre qu’il s'agit et de la perpétuation de l’espèce humaine et pas moins que cela . 

Dès lors tout le reste peut bien attendre….

C’est pourquoi il faudrait un changement radical de paradigme dans la gestion des États et des affaires du monde. Il faudrait promouvoir des États citoyens et modestes, visionnaires, prévenants et moins sûrs d’eux mêmes pour faire face à cette nature en furie.

 

Nous devons  aussi revoir les politiques de recherche scientifique en les orientant davantage vers le micro et le nano…

D'autant plus que cette rationalité limitée à la Herbert Simon qui caractérise nos administrations s'est traduite par le chaos inouï que vit le monde aujourd’hui et qui  est véritablement surréaliste.

 

Certes, cette catastrophe-ci est causée  par un micro organisme bien de chez nous, ayant dans sa matérialité une structure de base, l'ARN ,  voisine de la  nôtre, l'ADN, mais au fond ce qui est en cause  c'est notre rapport même à la nature dans sa globalité  et la perception surfaite que nous avons de nous mêmes au sein de cette nature que nous pensions avoir apprivoisée.

 

Vautrés dans une conception géocentrique du cosmos et Jules-Vernienne, donc linéaire et simpliste, du progrès, nous en avons oublié que la virtualité du chaos est une donnée permanente de notre existence voire une partie intégrante de la vie.

 

Le fait est que nous n'avons pas assez conscience de la fragilité de notre condition humaine de terriens et de celle de notre configuration de vie rapportée  à l'échelle cosmique.

 

Nous vivons dans un espace- temps correspondant à un quadrivecreur très réduit par rapport à l'infinie complexité de l'univers et aux possibilités de vie outrageusement plus subversive au sens étymologique du terme c'est-à-dire en sens dessus-dessous, et plus hétérogène voire lugubre qu'il recèle...

 

Nous ne sommes en fait qu'une projection au sens mathématique du terme sur un sous- espace de quatre dimensions  d'un hyperespace ayant un nombre infini de dimensions avec la possibilité d'avoir plusieurs temps à la fois et qui ne seraient pas que linéaires comme l'est notre temps à nous dont on sait pourtant qu'il se dilate et se restreint suivant la vitesse et donc la relativité à l'espace. 

 

Nous pourrions imaginer des formes de vie immatérielles au sens où  nous entendons  la matière ou une vie matérielle autre, qui ne reposerait pas sur le carbone principalement comme dans notre univers mais se situerait même en dehors du tableau de Mendeliev...

 

Ainsi, la nature, dans son infinie immensité et son impétueuse frénésie , pourrait en fait n'avoir cure de notre minuscule planète bleue au point même de s'en jouer....

C'est dire donc que le chaos n'est que le prolongement de la vie sous d'autres formes...à l'image de ce qu'est chez nous la guerre par rapport aux négociations...

 

Pourtant, des philosophes tel Max Planck l'avaient bien dit il y a longtemps:  la nature pourrait nous jouer des tours et devenir brusquement contingente au point d'infirmer nos lois scientifiques, les "falsifieraient" suivant l'acception de Karl Popper.

 

La théorie du chaos existe bien en mathématiques avec ses martingales. La théorie des catastrophes aussi. 

Les sciences sociales nous parlent dans le même ordre d'idées  des rapports dialectiques de l'homme à la nature et de la prégnance du mimesis d'appropriation et de prédation violente pour la survie.

Cela rejoint aussi le concept  de bifurcation chaotique à la Prigogyne; du nom de ce prix Nobel de chimie ou celui de montée des entropies dans les systèmes physiques complexes tels que la thermodynamique  Ce qui renvoie également aux théories de la résonnance. Et que dire de la physique des trous noirs et de l'antimatière qui est l'illustration de la possibilité de rupture brutale de notre règne matériel.et de son basculement subit dans les méandres du néant..

Nous avons également  en physique le mouvement Brownien et son pendant en finances qu'est la marche chaotique des marchés ...La théorie des jeux de Von Neumann et de Morgenstein fournit des outils. De même que la stratégie militaire qu' on enseigne dans les écoles de commandement. La culture politique accumulée empiriquement par les hommes politiques authentiques et/ou apprise par eux à bonne école pourrait bien aider à anticiper une crise de cette nature et à apporter une riposte efficace à celle-ci. La capacité d'anticipation des crises et le pouvoir de les  dénouer que possédait le Général de Gaulle tenait tant à sa cultute militaire qu' à son savoir-faire politique et à ses capacités intellectuelles et cognitives notamment sa connaissance de l'Histoire.

 

Toutes ces théories et disciplines auraient pu nous mettre à l'abri d'une telle déroute et nous permettre d'anticiper la crise acuelle et d'y apporter rapidement la réponse adéquate .  

 

Hėlas, cela ne s'est pas produit car les États sont aux mains des bureaucrates qui ne font que ce qu'ils ont l'habitude de faire et n'intègrent pas assez toutes les dimensions précitées dans une approche holiste et pluridisciplinaire qui multiplierait les angles d'attaque en vue d'adresser un problème aussi complexe que la crise qui secoue le monde aujourd'hui. Et que dire alors quand ces technocrates n'en sont pas réellement et qu'ils ne sont en fait qu'autoproclamés, des pseudo-hautes compétences (en arabe, ces fameuses "Kevaat Ouliya") comme cela arrive dans certains pays...?

 

Pour cette raison et afin d'outiller l'État nouveau  pour qu'il puisse appréhender mieux les crises et les catastrophes et gérer le chaos, les intellectuels et non plus seulement les technocrates

étroits et obtus (je ne parle pas ici des chefs d'Etat d'autant plus que certains parmi eux comme Emmanuel Macron ont bien des références intellectuelles comme lorsqu'il compara historiquement Boris Eltlsine à Pierre Le Grand tout en l'invitant à  Versailles mais de la technostructure étatique qui les entoure ), ont  plus que jamais un rôle à jouer auprès de cet État à réinventer dans la définition et la mise en œuvre du changement de paradigme à opérer pour l'avènement d'un monde nouveau plus représentatif du citoyen et  plus en phrase avec cette nature dont l'humanité n'est qu'une partie et un élément du même continuum..

 

Sans aller jusqu'à dire, comme le philosophe  Michel Onfray citant Platon, que l'État optimal devrait avoir à sa tête un philosophe,  nous pourrions tout de même avancer l'idée, eu égard à  la complexité et au caractère multidimensionnel de la crise sanitaire actuelle , selon laquelle  cet État nouveau devrait être dirigé non plus seulement par des technocrates formés à l'école de la bureaucratie, laquelle  servant en définitive  et surtout la reproduction sociale à l'identique et l'aliénation de l'individu, mais par des hommes et des femmes politiques de vaste culture, des intellectuels éclectiques, stratèges qui feraient recours dans leur exercice du pouvoir à  des concepts aussi bien de philosophie, d'histoire, de psychologie  ou encore de sociologie politique que de thermodynamique ou de microbiologie voire de nanotechnologie.

 

Ce sont toutes ces approches qui doivent être combinées pour sauver l'humanité du chaos en "l'endogèneisant" justement !

 

Mohamed Ali Ould Lemrabott,

Expert international en stratégies de développement économique et social, 

ancien Conseiller Stratégique du PNUD (ONU).

 

 

أربعاء, 29/04/2020 - 19:04