L’exploitation artisanale de l’or en Mauritanie

Le secteur minier informel en Mauritanie est essentiellement axé aujourd’hui, sur l’exploitation artisanale de l’or. L’orpaillage est d’ailleurs largement pratiqué en Afrique subsahélienne, depuis plusieurs années. Depuis fort longtemps d’ailleurs, l’extraction de l’or était prépondérante en l’Afrique de l’Ouest. Ainsi, on estime à plus de 400 tonnes, la quantité d’or extraite du Ghana (autrefois appelé Côte d’or) entre le 15ème et le 19ème siècle. Le commerce caravanier entre les pays de la zone subsahélienne et ceux du Maghreb était dominé par les échanges de l’or et des céréales, en provenance des pays du Sud contre le sel et les épices en provenance de ceux du Nord.

Plus tard, l’évolution des sciences permettra d’identifier cette zone, comme zone de l’un des cinq cratons du socle précambrien de l’Afrique. Ces cratons vont s’assembler pour constituer le continent africain vers la fin l’ère précambrienne qui est l’ère géologique la plus ancienne et qui s’étale de 4 Milliards à environ 540 Millions d’années (et qui contient les roches les anciennes). Le précambrien est lui aussi divisé en plusieurs périodes dont les périodes de l’archéen et du birrimien. Ce craton ouest africain est constitué des sous-cratons du boulier MAN-Leo (Zones Ghana, Cote d’ivoire, mali) et la Dorsale Reguibat au Nord et Nord-Ouest de la Mauritanie qui sont susceptibles de contenir des occurrences aurifères. La partie méridionale de ce craton a connu une exploitation intensive d’or depuis le moyen âge.

 Contrairement aux pays de la zone subsaharienne, la Mauritanie n’a jamais été un pays où l’orpaillage est pratiqué. D’une part parce que le relief favorable à cet orpaillage, est situé au Nord du pays, dans les régions chaudes et désertiques, alors que les zones favorables des pays riverains sont relativement clémentes (zones sahéliennes et tropicales généralement pluvieuses et verdoyantes). D’autres parts la découverte de l’or a été toujours considérée, dans le subconscient collectif en Mauritanie, comme une source de malédiction, plutôt qu’une source d’enrichissement et bien-être, car souvent associé aux forces du mal.

Dans le monde, on estime aujourd’hui que le nombre de personnes qui pratiquent l’orpaillage à plus de 40 millions, alors qu’ils n’étaient que 6 millions au début des années 90. Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce phénomène, dont la détérioration des conditions de vie des populations des pays du sud qui vivaient de l’agriculture et de l’élevage, à la suite des changements climatiques et la faiblesse des investissements dans ces secteurs. Une autre raison à l’engouement de ces populations pour l’orpaillage est la montée des prix des matières premières (Or surtout), depuis le début de ce siècle. L’orpaillage est aujourd’hui pratiqué dans plus de 70 pays du monde. Il fournit environ 20% de la production annuelle d’or dans le monde.

Il faut reconnaître qu’il a des avantages économiques et sociaux, en ce sens qu’il assure de l’emploi et des ressources financières pour certaines des communautés les plus pauvres du monde et à une échelle beaucoup plus importante que les exploitations minières industrielles. Il faut tout de même, réduire ses effets négatifs sur l’environnement et sur la santé et la sécurité de ces communautés, par la mise en place de moyens et technologies innovantes assurant à la fois rentabilité, sécurité, bien-être et respect du milieu naturel.

Contrairement aux autres pays de la sous-région où l’orpaillage est essentiellement pratiqué par les chômeurs et autres personnes sans ressources, l’orpaillage en Mauritanie a attiré plutôt la classe moyenne, c’est-à-dire ceux qui possèdent déjà des maisons, des troupeaux de bétail ou des véhicules 4×4, précédemment utilisés pour le transport interurbain, agissant comme ‘’petits investisseurs’’. Ceux-là n’hésitant pas à vendre leurs biens pour acquérir les détecteurs de métaux dernier cri, et mobiliser des expéditions dotées de véhicules 4×4, groupes électrogènes, marteaux piqueurs, main-d’œuvre spécialisée parfois étrangère, …etc. pour ‘’ tenter leurs chances’’, dès qu’un filon est trouvé quelque part, parfois à des distances éloignées de plusieurs centaines de km, au fin fond du désert.

Le signal de départ avait été donné, en début 2016 par la découverte dans la région de l’INCHIRI, d’une certaine quantité d’or en surface, apportant une richesse inattendue à celui la trouva. La nouvelle se répandit rapidement à travers tout le pays. Ensuite on verra la constitution d’interminables convois de véhicules 4×4, équipés en vivres et matériels adéquats prenant le chemin des zones géologiquement favorables (avec à l’appui cartes géologiques et GPS), testant par-ci, par-là et creusant n’importe quel filon susceptible de contenir le métal jaune.

Le premier acte juridique, consécutif à cette « ruée vers l’or » date du 22 Avril 2016 (peu de temps après la fièvre aurifère du début de l’année 2016). Il s’agit de l’arrêt N°356/MPME qui définit les zones dédiées à l’orpaillage ainsi que les conditions d’attribution des autorisations.

Plus tard en 2018, un autre arrêté conjoint avec le ministère des finances définit les différentes catégories des professions de la filière (orpailleurs de terrain, exploitants des unités de traitement, …etc.). Cet arrêté indique aussi l’obligation de vendre l’or extrait à la BCM.

La réglementation mauritanienne, notamment le Code minier, est clair au sujet des détenteurs des permis des petites exploitations minières en leur imposant le respect des mesures de sécurité et santé pour leurs employés ainsi que la préservation de l’environnement.

L’adhésion de la Mauritanie à l’ITIE lui impose la mise en place de ses normes et principes, notamment en ce qui concerne la publication régulière des avantages que procure l’extraction des ressources minérales aussi bien à l’État qu’aux populations vivant dans les localités où sont extraites ces substances, ainsi que le partage d’informations sur l’emploi par entité sociale (hommes, femmes et enfants).

Ahmed El Hassen
Consultant indépendant

أربعاء, 31/07/2024 - 16:28