Vers une réadaptation des programmes d’enseignement universitaire

Avant d'entamer le sujet, une mise au point à l'adresse de ceux qui ont l'habitude de me lire en arabe, me semble nécessaire. Je publie cet article en français simplement par ce qu'il estextrait d'un rapport que j'ai rédigé en français et destiné à des lecteurs francophones. 

N'étant pas candidat au poste de président de l'Université dont l'appel à candidature a été lancé récemment, n'étant plus également soumis à l'obligation de réserve qu'incombe la fonction administrative, je souhaite, comme le dit l'adage, faire contre mauvaise (bonne)fortune bon cœur. Je partage ici un certain nombre d'idées qui peuvent servir de balises sur le chemin d'une université que l'on voudrait multidisciplinaire, compétitive et innovante.

La politique nationale en matière d'éducation est déclinée dans le programme national de développement du secteur de l'éducation (PNDSE) qui traduit la vision du Gouvernement pour le dit secteur. Cette politique éducative a été réaffirmée dans la Stratégie Nationale de Croissance Accélérée et de Prospérité Partagée (SCAPP 2016-2030).

La déclaration de politique générale du gouvernement actuel annonce l'engagement dans une politique visant à promouvoir un enseignement supérieur en mesure d’accompagner l’évolution des connaissances et de contribuer efficacement au développement durable.

Pour ce faire, les établissements d’enseignement supérieur sont appelés à engager une refonte du contenu pédagogique et des programmes d’enseignement pour répondre aux exigences du développement et atteindre les objectifs fixés par le gouvernement.  La finalité de cette refonte est de contribuer à développer les compétences des jeunes étudiants mauritaniens et à soutenir leur employabilité.

La faculté des lettres et sciences humaines (FLSH), objet de cet article, est le plus grand établissement en termes d'effectif. Cette situation est due en partie aux conditions d’inscription non contraignantes sans conditions de note, de série du Bac ou d’âge, quoi que la condition de l'âge a connu une limitation non sans avoir provoquer des remous récurrents.A cela s’ajoute la grande diversité des filières et les enseignements dispensés en plusieurs langues. Une situation qui déstabilise le personnel administratif et enseignant et se répercute sur le déroulement des enseignements et la gestion administrative. Tout cela dans l’absence totale d’un système d’évaluation pédagogique efficace, d’un système d’orientation et d’information opérationnel en lien avec les opérateurs économiques et industriels du pays, sans parler de l’absence de climat favorable à la recherche scientifique.

Résultat : les étudiants s’inscrivent à la F.L.S.H. sans conviction et achèvent leurs parcours sans acquérir une qualification qui leur permette d’obtenir un emploi.

A mon sens, la F.L.S.H. a pour mission de former les futurs cadres dotés de compétences entrepreneuriales et managériales indispensables au tissu économique et industriel du pays.

C’est également au sein de cette faculté que seront formés les esprits créateurs et innovateurs capables d’assurer la jonction entre le passé glorieux et l’avenir prometteur à travers la sauvegarde et la valorisation du patrimoine culturel et religieux de la société.

La réalité est tout autre au sein de la F.L.S.H. qui souffre de la conjugaison de plusieurs obstacles dont voici les plus significatifs :

- Le système pédagogique : marqué par le manque d’harmonisation et de pertinence des spécialités.

- L’aspect estudiantin : marqué par une pléthore et un désespoir qui peut conduire à l’extrémisme.

- La gestion administrative : soufrant d’une carence en ressources humaines qualifiées et de l’absence de l’esprit d’initiative.

- Le faible rendement des équipes d’encadrement : marqué par le désordre dans la répartition des enseignements.

- La carence en matière de gestion et de gouvernance : d’où le manque de créativité et d’innovation et le gaspillage des ressources disponibles.

Bien évidemment ce constat traduit un climat général mais ne remet pas en cause les compétences individuelles au sein de la Faculté.

Concrètement, on peut envisager de rendre la F.L. S. H. compétitive en concentrantl'action sur les aspects suivants : 

• La maitrise des langues.

• L’usage des technologies de l'information et de la communication (TIC)

• Les valeurs morales et civiques

• L’information et l’orientation

• La culture entrepreneuriale

 

La maîtrise des langues

Sur cet aspect, la situation est alarmante, les étudiants ont beaucoup de mal à exprimer correctement leurs idées. Aussi bien oralement qu’à l’écrit, l’étudiant mauritanien reste pénalisé par la médiocre qualité rédactionnelle et linguistique de sa production. Il suffit pour s’en convaincre de lire quelques copies d’étudiants. 

J’ai demandé à des instituteurs expérimentés en langues et littérature d’évaluer le niveau en langue d’un échantillon de mes étudiants à travers leurs copies. Leur verdict a été choquant : les copies avaient un niveau de 3eme année du primaire.

Par conséquent, la situation est préoccupante et nécessite des mesures efficaces pour améliorer le niveau linguistique des étudiants. 

L’usage des TIC

Une absence d’appropriation massive de l’outil informatique et des ressources pédagogiques numériques aussi bien pour les équipes d’encadrement que pour les étudiants. Pourtant l’usage des technologies éducatives est maintenant une pratique courates dans les grandes universités tournées vers la modernité et l’optimisation des moyens. La pandémie du covid 19 a démontré l'étendue du retard que nous accusons en la matière.

 

Les valeurs civiques et morales 

Aussi surprenant que cela puisse paraitre, nos étudiants souffrent d’un manque d’appropriation des valeurs morales et civiques propres à notre société. Cette situation les rend très vulnérables et enclins aux dérives.

Dans le monde d’aujourd’hui marqué par le terrorisme et le fanatisme de tous bords, il serait indispensable de construire dès à présent l’individu mauritanien du XXIème siècle car sans la stabilité et la sécurité il ne peut y avoir ni enseignement et ni de développement.

Nous assistons à une dégradation grave des valeurs de notre société au sein de la jeunesse mauritanienne. Cette situation se répercute sur le comportement de certains étudiants marqués par le vandalisme et la politisation de la vie étudiante voir même une potentielle réceptivitéaux idées extrémistes. Certes le phénomène est encore assez réduit mais tout laisse penser qu’il va s’amplifier si des mesures adéquates ne sont pas prises.

L’information et l’orientation académique 

Réussir son parcours universitaire, c'est savoir s’orienter, réussir le développement économique d'un pays c'est informer et orienter les étudiants durant leurs parcours universitaires. Les états modernes ont pris cet aspect en considération.

En France par exemple, il existe des centaines de centres d’information et d’orientation C.I.O. implantés sur l'ensemble du territoire. Ce système existe également au Sénégal et au Maroc.

​L’information et l’orientation sont un organe important du système universitaire moderne, leur rôle consiste à proposer un appui aux étudiants sur leurs parcours universitaire et créer et maintenir le lien entre l’étudiant, l’université et la société. 

 

La culture entrepreneuriale

La culture entrepreneuriale est indispensable pour développer l’esprit d’initiative et encourager l’investissement dans le but de créer plus de petites et moyennes entreprises productives. Elle permet aux porteurs de projet d’acquérir les compétences et le savoir-faire qui leur permettent de prendre les initiatives et les risques positifs. Il s’agit de favoriser chez l’étudiant une représentation constructive de sa vision du monde (environnement socio-économique), de son identité (personnalité et Potentiel) et de son pouvoir d’action (action entrepreneurial).

Comment mettre en œuvres ses mesures ?

A une situation exceptionnelle, il faudrait certainement envisager une solution exceptionnelle.

La solution doit être à la mesure de l’ampleur des difficultés auxquelles font face les jeunes mauritaniens et pour les études et pour l'emploi. Cette solution doit être également à la hauteur des ambitions de notre pays et des défis qu’il doit relever. Je voudrais saluer ici la réactivité et l'esprit d'anticipation qui caractérise l'action du Gouvernement dans les situations exceptionnelles qu'a connu notre pays. En prorogeant de 3 ans l’âge limite de départ à la retraite, le Gouvernement a pris une mesure qui contribuera sans doute à atténuer sensiblement l'impact de la carence en personnels qualifiés.

 

أحد, 26/07/2020 - 14:12