L’ancien et le nouveau président mauritanien sont-ils sur la même longueur d’onde, celle d’une re-passation éventuelle de pouvoir ? À l’inverse, le feu de la concurrence couve-t-il sous la bienséance ?
« Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette, le premier qui quittera le pouvoir laissera la place à l’autre » : le swap politicien évite une modification constitutionnelle. Souvent rêvé, il a rarement été déployé avec succès, si ce n’est dans la Russie de Vladimir Poutine et de Dimitri Medvedev, alternativement président et Premier ministre.
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Moins contraint par un nombre global que consécutif de mandats présidentiels, le Mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz passa son tour en 2019, espérant manifestement qu’un affidé lui garde le fauteuil au chaud jusqu’au scrutin de 2024. Le dauphin supposé docile fut Mohamed Ould Ghazouani. Le désormais ancien chef de l’État distilla alors, à qui voulait l’entendre, qu’il n’y avait qu’un président, pas deux…
Ghazouani, le Macron mauritanien ?
Mais un bon accord est un accord discret. Or, un tel pacte exclut la présence de nombreux témoins susceptibles de laver le linge de la trahison éventuelle sur la place publique. Ghazouani a-t-il promis bienveillance présidentielle à Aziz ? En quels termes et avec quelles garanties ?
Promu comme un Emmanuel Macron par François Hollande, le « second du régime » – tout de même général sexagénaire et non novice trentenaire – s’est-il senti pousser des ailes, au point de mettre sur la touche, comme Macron, « son » Hollande à lui ? Déjà, les observateurs tentent de décrypter les signes d’un début de mandat conflictuel…
Potiche medvedienne
Pour attendre au chaud la prochaine échéance électorale, rien de tel que de tirer les ficelles politiciennes derrière les rênes du pouvoir national. Mais les appels du pied de Mohamed Ould Abdelaziz au bureau exécutif de l’Union pour la République (UPR), le parti présidentiel, ne seraient pas du goût de Mohamed Ould Ghazouani.
Le président mauritanien n’entendrait jouer les potiches medvediennes ni sous les lambris du palais – où il remanie chirurgicalement – , ni dans les arcanes politicardes. « C’est moi le chef », pensent avoir lu sur ses lèvres les sympathisants de la mouvance, même si le chef de l’État actuel diffuse également un discours bienséant de « touche pas à l’ancien président ».
Alors que l’opposition demande des enquêtes sur ses mandats, il reste à Mohamed Ould Abdelaziz à trouver sa place, s’il ne veut pas tituber au prochain jeu de chaises musicales électorales. Pour l’heure, rentré depuis peu à Nouakchott, il a boycotté la célébration de l’Indépendance qui se déroulait pourtant dans son fief. « Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette, le premier qui rira verra de quel bois je me chauffe…»