C’est une information remontée par nos confrères d’Africa Mining Intelligence dans leur édition du 26 novembre, de celles qui en disent long sans trop en dire. Intitulé « Endeavour s’intéresse-t-il à l’or du pays ? », l’article évoque une réunion qui aurait eu lieu début octobre, en marge d’un forum d’affaires le 10 octobre organisé à Paris par Medef International, entre le ministre Mohamed Ould Abdel Vetah et Sébastien de Montessus, PDG d’Endeavour Mining, l’un des leaders de l’or en Afrique de l’Ouest.
Engagé dans l’exploration d’or sur cinq mines déjà en activité en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso et au Mali, Endeavour ne cache pas son intérêt pour tous les pays à fort potentiel aurifère dans la sous-région. Alors quoi de plus normal que de discuter d’un hypothétique permis d’exploitation minière en Mauritanie, a priori ?
Sauf que la discussion s’est tenue entre deux hommes au passif notoirement opaque. D’un côté, un ministre du pétrole, de l’énergie et des mines qui s’est illustré sous la Présidence Aziz par la distribution de licences d’exploitation minière avec des vérifications préalables insuffisantes – une légèreté qui a entraîné l’annulation par le président Ghazouani de trois permis d’exploitation du granite, début octobre. De telles pratiques seraient-elles susceptibles de se répéter ?
Le spectre du scandale Uramin
De l’autre, un PDG à la réputation entachée par le scandale Uramin alors qu’il était un haut cadre d’Areva. Rappelons que le rachat de cette société détentrice de trois gisements d’uranium inexploitables en Namibie, Afrique du Sud et Centrafrique a fait perdre 2,5 milliards d’euros au groupe nucléaire français. Une sale affaire qui a valu à Sébastien de Montessus d’être mis en examen fin mars 2018 pour abus de confiance, corruption d’argent public étranger et corruption privée pour avoir empoché un pot-de-vin après avoir octroyé un énorme contrat à Georges Forrest, un richissime entrepreneur belge essentiellement actif en Afrique centrale. Détail important, ce pot-de-vin a partiellement servi à l’achat du voilier de luxe Cape Arrow et les comptes à partir desquels ont été réalisés ces paiements étaient détenus par Hélin International, une société émiratie épinglée par les Dubaï Papers…
C’est donc le principe même d’une réunion en « off » entre deux hommes aux pratiques douteuses qui interroge. La démarche a-t-elle été impulsée par le gouvernement mauritanien ? Ould Abdel Vetah en a-t-il pris l’initiative personnellement ? Alors que la situation politique est déjà compliquée par le retour d’Aziz et la mainmise de l’ancien régime sur nos ressources naturelles les plus précieuses, le pays ne mérite-t-il pas mieux que ce bégaiement de l’Histoire ?
Ben Abdalla
Le Calame