Un jour, le président François Hollande excédé par la dérive d’un certain discours politique français à forte teneur populiste, a tenu à faire la mise au point qui suit : « La République ne connaît pas de races ni de couleurs de peau. Elle ne reconnaît pas de communautés. Elle ne connaît que des citoyens, libres et égaux en droit. Et ce n’est pas négociable ».
Ajoutons à la précision de l’ancien président français qu’ethnie et peuple ne sont pas interchangeables. L’une n’étant qu’une partie de l’autre, c’est pourquoi on parle de peuple ou Nation française ou sénégalaise, etc., en se référant à la somme de toutes ses composantes ethniques.
Justement, le Nationalisme peul est transfrontalier, ses théoriciens, à défaut d’un État exclusif haalpular, militent partout où ils sont, au niveau de chaque État ouest-africain, afin d’obtenir la reconnaissance comme ethnie-peuple que l’on doit doter des droits garantis aux peuples. Et parce que les peuples sont égaux en droit, ils se fondent sur cette notion, la transposent et revendiquent l’égalité ethnique.
Admettons que l’État mauritanien ait inscrit dans sa Constitution l’égalité entre les ethnies de sa population, va-t-on lui demander encore de décréter que les Peuls, les Soninkés, les Wolofs et les Arabes soient savants, riches, artistes, sportifs, commerçants, industrieux et ingénieux au même degré?
Un tel nivellement est évidemment impossible.
L’État est comme une famille et rien ne garantit que les enfants d’une même famille, traités et éduqués de la même manière, juste et appropriée, réussissent de la même façon. D’autres facteurs objectifs, qui n’ont rien à avoir avec l’action gouvernementale, jouent pour déterminer la trajectoire de chacun d’eux, pour le conduire à la réussite ou à l’échec ou à une position intermédiaire. C’est dans l’ordre naturel des choses. Par contre, il est du devoir de l’État, et c’est facile, de poser les règles de justice, d’équité et d’égalité des chances, les mêmes pour tous, et les faire respecter ; parce qu’il est le protecteur, le distributeur et le régulateur. Et dans ces conditions, l’ascenseur social devra fonctionner en toute normalité au profit de tous les citoyens sans que leur ascension soit garantie, puisqu’il y a des facteurs qui font qu’un groupe émerge et un autre reste à la traîne. Il s’agit du dynamisme, de l’esprit d’initiative, de la créativité, de l’ingéniosité, de l’histoire, de la démographie, etc.
Qui connaît l’Afrique sait que ses ethnies n’avaient pas joué le même rôle dans la création et l’indépendance des États ; comme elles n’avaient ni la même importance historique ni le même poids démographique.
Au Mali, par exemple, comment peut-on en toute logique mettre sur un pied d’égalité les Bambaras et les Bozo ?
Le faire serait une grosse erreur d’appréciation et d’ignorance de la géographie humaine malienne !
De manière générale, les Nations ne progressent pas de la même manière et au même rythme mais la roue de l’Histoire tourne. Ainsi, pendant une époque, les Arabes avaient dominé, ils étaient arrivés à Poitiers en France. Pendant le dix-huitième et le dix-neuvième siècles, les Anglais et les Français étaient les maîtres du monde. Après la deuxième guerre mondiale le leadership universel est passé aux Américains et aux Russes. Demain, ça sera le tour des Chinois et ainsi de suite. Donc, il n’y a pas de fatalité en la matière. C’est par le travail et par les grandes œuvres que les peuples se distinguent et vont de l’avant. Il est irrationnel de chercher à brûler les étapes ou engager une concurrence dont les termes sont loin d’être les mêmes pour tous.
En rapport avec la question de l’égalité ethnique, les Négro-communautaristes posent aussi celle de l’égalité linguistique en soutenant que toutes les langues se valent. Sur ce point, ils ont raison, du moins en partie, dans la mesure où la langue est par définition un système de communication. Tout à fait, mais les langues ne sont pas au même degré de développement et elles n’ont pas toutes le même rayonnement international. Va-t-on, par particularisme mettre l’Occitan ou le catalan ou le tahitien au même degré d’influence planétaire que le français, langue universelle, onusienne et classée à la quatrième ou à la cinquième place sur la liste des langues les plus parlées au monde ?
L’intégration c’est : « la fusion d’un territoire ou d’une minorité dans l’ensemble national ». Elle est tout sauf l’exclusion ; parce qu’elle « se distingue de l’assimilation qui tend à faire disparaître toute spécificité culturelle ». L’intégration raffermit donc les liens sociaux et refuse la ghettoïsation porteuse de ségrégation, son objectif est de mixer les ethnies dans un même moule pour en faire une même Nation, bigarrée certes mais Nation unie tout de même.
Extrait de ‘’Mauritanie : vous avez dit vivre ensemble ?’’.