Un an après son élection, le président mauritanien a réussi à prendre le contrôle de tous les leviers du pouvoir. Quitte à s’éloigner de son prédécesseur et mentor, Mohamed Ould Abdelaziz.
Au troisième étage du palais présidentiel de Nouakchott, dans l’intimité de ses appartements privés, Mohamed Ould Ghazouani aime à partager son déjeuner avec ses collaborateurs. Le chef de l’État, qui plaisante volontiers avec eux, a discrètement réhabilité le thé, formellement interdit par Maaouiya Ould Taya après qu’on lui eut présenté un dossier taché.
Son prédécesseur, Mohamed Ould Abdelaziz, qui fut aussi son plus proche ami, vivait replié sur son clan familial et veillait à rester inaccessible. Ghazouani, lui, quand il n’est pas au chevet du chef d’état-major de la gendarmerie, téléphone à un ministre souffrant pour s’enquérir de sa santé. « Il se soucie sincèrement des autres, il aime les gens », dit un proche. En cultivant ses amitiés et en ménageant ses ennemis, le président de la République continue, un an après son élection, le 23 juin 2019, à faire consensus.
À son arrivée au pouvoir, Mohamed Ould Ghazouani, 63 ans, avait une obsession : se débarrasser au plus vite de son image de marionnette d’« Aziz », alors encore solidement ancrée dans l’esprit des Mauritaniens. Les deux amis de quarante ans ont aussi un lien familial, puisque le premier a été marié à une nièce du second avec qui il a eu deux enfants. « Il est issu d’une vraie aristocratie locale et cultive les bonnes manières. Pour l’ex-président, cela signifie qu’il est faible, confie un collaborateur. Mais Aziz n’a réussi ni à le cerner ni à anticiper son désir d’indépendance. » Les deux ex-généraux n’avaient conclu aucun pacte, pas plus qu’ils n’étaient convenus de se partager le pouvoir.