L’effet El Ghazouani

Cent jours. C’est très peu pour la croissance d’un poulet, voire pour la rémission d’une maladie, même bénigne. Alors pourquoi -comment s’impatienter quand il s’agit de croissance et de pathologies de l’Etat ? Pour certains, le tout –nouveau président ne fait qu’atermoyer, faisant languir une population éprise de changement ; d’un changement rapide, profond, aussi bien nécessaire que durable. La méthode  et la façon de communiquer de  Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, semble trancher avec celle des autres chefs d’Etat ; tous, sans exception,   déroulent  le one man show trivial  : irruption en fracas, voire en éléphant dans un magasin de porcelaine, dans l’Espace politique ; discours tonitruants, promettant monts et merveilles dès potion minet ; exhumation des dossiers fumants et nauséabonds, aptes à l’empêtrer lui-même dans un brouillamini l’empêchant de se gratter le genou.

Poli à l’envi, patient à décourager plus d’un soufi, un  silence olympien et  une capacité d’écoute à toute épreuve, sont quasiment  les réactions du Président  à tout stimuli extérieur. C’est très bien, d’autant plus que ce n’est pas donné à tout le monde. Mais ça peut troubler des populations habituées à des leaders par trop réactifs et à l’autorité cassante. Chacun a son style, De Gaulle disait : «  Il y a deux façons de dire une chose ; la douce et la patibulaire, je préfère la dernière »  Le Président  El Ghazouani, quant à lui, opte résolument pour la douce.  Même si certains désapprouvent sa méthode, celle-là a déjà son effet positif : depuis son avènement, l’espace politique est plutôt calme et les revendications sociales et communautaires moins véhémentes.

 

Coquilles sporadiques

De l’argent, il semble en manquer pour dérouler son programme. Une expérience quasi-éternelle nous apprend que les Etats vivent d’argent, mais ne meurent jamais par la mouise. A titre d’exemple : au Congo, en 1972, un zaïre valait deux dollars ; en 1991, un dollars en valait 4 millions. La monnaie puissante du Congo mua en monnaie de singe, réduisant à la déliquescence l’Economie du pays qualifié de « scandale géologique » D’après le RAMSES 2018 (Rapport Annuel Mondial sur le Système Economique et les stratégies, émis par l’Institut Français des Relations internationales), la RDC affiche un taux de croissance du PIB de 6,92, en 2015 ; un taux d’inflation de 0, 96 ; et un taux de corruption de 21, tandis que la Mauritanie  est à 0,58 de croissance de PIB (données 2015), avec un taux d’inflation de 3,77 et 27 de corruption.

Ce n’est pas là un hymne à la prévarication, mais c’est dire que les Etats ont plus besoin d’autres choses. Par exemple, les Ressources humaines : moteur et promoteur de l’Etat. Après le léopard de Kinshasa, les cadres formés dans de grandes écoles ont su faire renaitre le Zaïre et sa monnaie de leurs cendres. Nommer n’importe qui n’importe où est le pire des actes de commandement et de management. Imaginons le capitaine confiant la chaudière à un matelot  carent puisqu’il est parent, tandis que le navire dérive vers le récif a  vitalement besoin d’un ingénieur capable ?  Avec le Président Mohamed Ould Cheikh, on note une amélioration en la matière : moins de jouvenceaux ou de jouvencelles néophytes à des postes stratégiques de la haute administration ; moins de vieillards  analphabètes parvenus à la faveur des méandres de l’Histoire.  Mais, force est de constater de petites coquilles sporadiques résiduelles. De nouveaux promus  à de grands postes parlent un arabe et /ou un français approximatif.

Nous comptons sur l’homme du nouvel espoir pour séparer le bon grain de l’ivraie. Les écuries d’Augias nécessitent une très longue haleine.

Fidele à son caractère et à sa méthode, nous l’avons entendu dire : « je vais y aller à mon rythme » Peu importe le rythme, l’essentiel est de continuer à filer du bon coton.

                                                                                                            

Brahim Bakar Sneiba, écrivain-journaliste

خميس, 21/11/2019 - 11:06